Jeudi 3 juin - les valses qui font danser Vienne de pĂšre en fils đ¶
Nous fĂȘtons les KĂ©vin, Kelvyn !
Saint Kévin, abbé et fondateur de l'abbaye de Glendalough, prÚs de Dublin, en Irlande. Il est mort en 618 et est, avec Saint Patrick, le plus célÚbre des saints irlandais. Le prénom Kevin vient d'un mot celte qui signifie "celui qui est bien planté".
A la mĂȘme date, nous honorons aussi les Saints Martyrs de l'Ouganda, Charles Lwanga et ses 21 compagnons, victimes de la persĂ©cution du roi Mwanga en 1886.
đ Le dicton du jour : "Le temps qu'il fait en juin le trois, sera le temps du mois"
đ La citation du jour : "Le peu que je sais, câest Ă mon ignorance que je le dois." Sacha Guitry
Cela sâest passĂ© un 3 juin :
3 juin 1899 - décÚs de Johann Strauss
La famille Strauss est originaire de Basse-Autriche. Fils aĂźnĂ© du compositeur Johann Strauss et de Maria Anna Streim, Johann Strauss fils a cinq frĂšres et sĆurs : Josef (nĂ© en 1827), Anne (nĂ©e en 1829), ThĂ©rĂšse (nĂ©e en 1831), Ferdinand (nĂ© en 1834 mais qui ne vĂ©cut que 10 mois) et Eduard (nĂ© en 1835).
Il naßt à St Ulrich prÚs de Vienne (aujourd'hui une partie de Neubau), le 25 octobre 1825. Son arriÚre-grand-pÚre paternel était un juif hongrois. Ce fait sera dissimulé par les nazis, qui soutenaient Strauss dont la musique, disaient-ils, était « aussi allemande ».
Johann Strauss fils est capable dâĂ©crire les premiĂšres mesures dâune valse dĂšs lâĂąge de six ans.
Une bien sombre perspective pour son pĂšre, qui prĂ©voit pour lui un emploi de banquier ! Avec la complicitĂ© de sa mĂšre, il parvient malgrĂ© tout Ă suivre des cours de piano et de violon (avec le 1er violon de lâorchestre de son pĂšre) dans le plus grand secret. Le travail porte ses fruits, mais il faut attendre que le pĂšre quitte le foyer, lorsque Johann a dix-sept ans, pour que de solides Ă©tudes musicales puissent ĂȘtre entreprises (violon, thĂ©orie, composition). Dans la foulĂ©e, il obtient lâautorisation de donner des concerts publics alors quâil nâest pas encore majeur, et forme son premier orchestre. Il fait alors entendre ses premiĂšres Ćuvres, qui recueillent lâĂ©loge des critiques.
Son autoritĂ© devient si Ă©clatante que son pĂšre ne peut plus lâignorer, mais il met tout en Ćuvre pour gĂȘner son ascension, jusquâĂ ce quâune rĂ©conciliation tardive ait lieu.
Ă la mort de son pĂšre, Johann rĂ©unit les deux orchestres prestigieux de son pĂšre et de lui-mĂȘme, appartenant aux 1er et 2e Vienna Citizenâs Regiments et hĂ©rite, grĂące Ă leur rĂ©conciliation in extremis, de tous ses contrats, dont le titre prestigieux de directeur des bals au chĂąteau de Schönbrunn (qui sera ensuite transmis Ă Josef).
Les voyages sont nombreux (moins nombreux cependant que pour son pĂšre), Ă la mesure du prestige immense obtenu par les Strauss : en Europe, en Russie, aux Ătats-Unis. Rares sont les Ă©vĂ©nements Ă Vienne et en Europe auxquels Johann fils ou un de ses frĂšres ne participent pas. Johann est considĂ©rĂ© comme le premier compositeur de danses dâEurope, dans une Vienne qui connaĂźt son apogĂ©e et rayonne comme jamais en Europe.
SpĂ©cialisĂ© dans un rĂ©pertoire lĂ©ger, Johann Strauss fils est pourtant admirĂ© par de nombreux compositeurs au style plus sĂ©rieux, comme Wagner, Verdi ou Brahms, Mahler, Wagner, Liszt⊠En contrepartie, lui et son frĂšre Josef font justement figurer bon nombre dâĆuvres de ces compositeurs Ă leurs concerts. Hommage suprĂȘme, les trois compositeurs de lâĂ©cole de Vienne, pionniers dans les musiques les plus avancĂ©es du XXe siĂšcle, transcrivent certaines des valses des Strauss pour ensembles de musique de chambre.
Johann Strauss et Brahms Ă Bad Ischl en 1894
En 1863, il est nommĂ© directeur des Bals de la cour. C'est alors l'Ă©poque de ses grandes valses : Le Beau Danube bleu (1867) et Histoires de la forĂȘt viennoise (1868). Il abandonne petit Ă petit son orchestre Ă ses deux frĂšres, pour se consacrer Ă lâopĂ©rette. AprĂšs quelques tentatives, il donne son premier chef-d'Ćuvre dans ce domaine : La Chauve-Souris (1874) ; le deuxiĂšme sera Le Baron tzigane (1885).
En 1888, il Ă©crit, pour le quarantiĂšme anniversaire de l'accession au trĂŽne de François-Joseph, sa valse au trĂšs grand style : La Valse de l'Empereur. Son essai Ă la musique sĂ©rieuse se traduit par un opĂ©ra-comique en 1892, Le Chevalier Pasman. Sa derniĂšre Ćuvre est un ballet : Cendrillon.
Il meurt d'une pneumonie le 3 juin 1899 aprÚs avoir composé prÚs de deux cents valses, environ cent quarante polkas, quarante-cinq marches et soixante-dix quadrilles.
La valse, une affaire de famille
Johann Strauss (le pĂšre) entame sa carriĂšre au dĂ©but du XIXe siĂšcle dans un orchestre de danse, puis devient chef de son propre orchestre de 200 musiciens. Il est alors surnommĂ© "le roi de la valse" et devient Ă 44 ans directeur des bals au chĂąteau de Schönbrunn. Le rapport conflictuel quâil a eu avec son fils Johann depuis le dĂ©but se dĂ©tend heureusement juste avant sa mort. Johann (le fils) a alors 24 ans et peut enfin espĂ©rer faire une carriĂšre Ă la mesure de son talent.
Johann fils reprend lâorchestre de son pĂšre et, par le raffinement de son Ă©criture, donne ses lettres de noblesse Ă la valse. Ă 28 ans, Ă bout de force en raison du surmenage (il est victime dâune attaque), il prend sept semaines de repos et demande Ă son frĂšre Josef de lui succĂ©der. DĂšs lors, câest principalement la composition qui occupe son temps (en dehors de quelques concerts de prestige) ; ses plus belles Ćuvres naissent durant cette pĂ©riode.
Josef se destinait Ă une carriĂšre dâingĂ©nieur. Il accepte non sans rĂ©ticence de reprendre le flambeau, mais se trouve lui aussi pris dans la spirale infernale du surmenage et demande Ă son tour Ă son frĂšre (Eduard, le cadet) de prendre la suite, ou tout du moins de le seconder. Lui et Johann fils dominent la scĂšne viennoise durant vingt ans, jusquâĂ la fin des annĂ©es 1870.
La valse fait danser lâEurope
Lâun des grands mĂ©rites des Strauss est dâavoir transformĂ© une danse rurale en une danse brillante capable dâĂ©tourdir Vienne et lâEurope entiĂšre (mais aussi la Russie et les Ătats-Unis). Lâart raffinĂ© de Johann Strauss fils lui inspire des thĂšmes plus riches, permettant Ă la valse dâentrer dans le domaine de la musique savante. Lors dâune cĂ©rĂ©monie dâhommage pour ses 69 ans, Johann fils rappelle quels sont les mĂ©rites de ses prĂ©dĂ©cesseurs dans le succĂšs inconcevable de cette danse ; trĂšs humblement, il estime nâavoir eu quâune mince contribution Ă lâĂ©laboration du genre : câest lâĆuvre dâune famille !