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L'arche de Jackie
2 août 2019

Noir de jais - hommage à ma mère !

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ma mère, couturière de formation et de profession pendant de longues années, m'a donné l'amour des tissus, de la couture (même si je ne pratique pas et de loin à sa mesure...), de la broderie et de tout ce qui touche à ces matières nobles, dentelles, parements oubliés de nos jours, broderies...
elle m'a donné, il y a quelques années, quelques parures qui lui avaient été remises, dans les années 50, par une de celles qui l'avait guidée dans son métier ; je voulais les partager avec vous à la fois en souvenir de tout ce qu'elle m'a appris et pour la beauté de ces petites choses

ces parements** servaient, pour la plupart, sur des vêtements réservés aux femmes d'un certain âge pour des toilettes, plus ou moins sophistiquées et souvent - tout au moins pour les noires ou les grises - en période de deuil ou demi-deuil ; le jais est la pierre utilisée dans la plupart de ces réalisations sur base de dentelle ;


** Un parement (ou une parementure) est une pièce de tissu que l'on coud le long du bord d'un vêtement et que l'on rabat vers l'envers (pour être invisible) ou vers l'endroit (pour être décoratif).

Étymologie du jais
Gagas était une ville et un fleuve de Lycie (Asie Mineure), où se trouvait une roche noire (gagatês, pierre de Gagas) probablement plus proche du bitume que du jais. Le terme gagates, repris par Pline l'Ancien, a donné « iaiet » et « jayet » en vieux français, puis jais en français moderne. Jayet est actuellement utilisé en Suisse romande. Gagat est demeuré le terme allemand, alors que les Anglais disent actuellement jet, après avoir employé « geate », « geat » et « jeat ».
Jusqu'au siècle dernier, le jais était parfois improprement désigné sous le nom d'ambre noir, car il se rencontre aussi dans les gisements d'ambre, et possède des propriétés électriques parfois équivalentes.
Histoire du jais
Dès la préhistoire, le jais est utilisé. On a en effet découvert un collier de jais de 2 mètres de long au « dolmen de Morency » à Bénaix, près de Lavelanet (Ariège).
Le jais était connu et exploité en Angleterre durant le IIe millénaire avant J-C, sur la côte nord-est (Yorkshire) : boules, pendentifs et amulettes se retrouvent dans les anciens tertres funéraires. Les Romains exportèrent le jais anglais à Rome, où il était travaillé en bijouterie.
- Au Moyen Âge, il fut aussi très apprécié. Des amulettes de jais ont été trouvées dans les villages indiens du sud-ouest des États-Unis.
Le premier moulin à jais équipé de meules fut construit en 1602 à Léran. Puis l’industrie du jais s’est implantée et développée à Sainte Colombe sur l’Hers (Aude) et dans les villages proches (Le Peyrat), La Bastide sur l’Hers, Léran), à proximité des lieux d’extraction.
- Au XVIIIe siècle, alors que l’industrie du jais était à son apogée, les ateliers de Sainte Colombe et de La Bastide sur l’Hers employaient 1200 à 1500 ouvriers. Les « pâtenotriers en jais » en faisaient des bijoux de deuil, des chapelets, des croix, et l'artisanat français était très actif.
- Au 19ème siècle, beaucoup de protestants travaillaient dans l’industrie du jais (ouvriers ou patrons). Justin Acher était à la tête de cette industrie.
Cependant, il y avait peu de grandes fabriques. Les plus importantes étaient l’usine de Bel Air à Lesparrou et l’usine de la Bastide sur l’Hers.
Cette industrie s’est développée à proximité de cours d’eau (nécessaires au fonctionnement d’un moulin à jais).
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, plusieurs tonnes de jais étaient produites annuellement (6,2 tonnes pour la seule Indochine française en 1895).- Très populaire à l'époque victorienne, dont il devint le symbole au début du XXe siècle, le jais est actuellement plutôt délaissé. Il a servi à confectionner des ornements liturgiques (crosses d'évêque, par exemple).
Plus tard, le jais a servi à la confection d’objets de parure pour le deuil (croix, colliers, perles de chapelets, boutons, boucles d’oreilles…) ou encore de certains ornements (pour des robes…), portés par les femmes en deuil.
Les raisons de son déclin
Le déclin de cette industrie débute vers 1780. Malgré un léger regain d’activité au début du 19ème siècle, la fabrication du jais devient de plus en plus marginale entre 1840 et 1880.
L’exploitation des mines des Corbières étant coûteuse, elles sont abandonnées au profit des mines d’Aragon qui produisent un jais très pur et beaucoup moins cher que le prix de la seule extraction en France (malgré les frais de transport et le bénéfice que touchent les commerçants)
La confection d’une parure en jais nécessite un personnel important, qui ne peut être remplacé par la mécanique (les rendements restent par conséquent relativement faibles)
Dès le début du 18ème siècle, l’épuisement des mines locales favorise l’importation de minerais d’Espagne. Le verre teinté venu d’Allemagne, qui nécessite moins de main d’œuvre et qui est par conséquent moins cher, devient un concurrent important. Un bijou en jais demande un entretien régulier, sous peine de la perte irréversible de son éclat, alors que verre teinté d’Allemagne a une brillance qui ne s’altère pas. Les traditions liées au deuil tendent à disparaître. Les taxes sur les objets en jais importés, décidées par l’Espagne, sont exorbitantes
Façonnage et traitement du jais
Au XIXe siècle, et jusque vers 1925, le jais était travaillé, à Whitby et à Oviedo, pour confectionner des bijoux de deuil. Il s'ébauche au couteau d'acier, puis sur une meule de cuir au tripoli additionné d'huile. Iil se polit finalement sur la paume de la main. Lors du travail, il faut le passer souvent à l'eau pour ne pas le faire chauffer afin d'éviter les cassures.

pour compléter ce petit hommage à ma mère, à son métier et surtout à cette passion du travail autour du tissu, de la laine, du fil dont elle m'a transmis quelques petites ondes créatrices... elle qui nous a confectionné, durant notre enfance, la majorité de nos vêtements tout comme pour beaucoup d'ailleurs, entre robes, manteaux, robes de mariées, pantalons et costumes (c'est elle qui avait réalisé, pour le jour de leur mariage, les costumes de mon père, de son frère sans parler des robes et autres tailleurs ainsi que certains articles les accompagnant, chapeaux, besaces...)... je voulais partager également quelques uns de ces ouvrages plus récent au crochet ou en broderie traditionnelle !

colomb10 :l:
http://www.kizoa.fr/Montage-Video/d1003 ... s-de-maman

 

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Commentaires
J
Merci à toi Martine de m'avoir fait replonger dans ces souvenirs et découvrir cet univers ! pour le cahier, je l'ai très souvent feuilleté avec ma mère, étant enfant, subjugué par la minutie de son travail (sans parler de l'écriture à la plume qui, à elle seule, était magnifique) ; chaque pas dans l'apprentissage de son futur métier était tout d'abord théorique puis tout était miniaturisé : de minuscules cols, chemises ou chemisiers, pantalons, vestons, robes, plis divers et variés, points spéciaux.... bref un travail de fourmi si précis et délicat que tout ceci m'a très certainement donné le goût des points, des fils, des tissus et surtout la reconnaissance de métiers d'art même appliqués au quotidien comme pour les torchons, les serviettes, les draps, les tabliers... je suis heureuse de vous avoir permis d'entrer dans cette petite part de mon histoire familiale ! même si je ne prends que très peu de choses parmi tout ce que mes parents nous ont laissé, ce cahier - si simple a priori et sans intérêt pour des personnes peu intéressées par son histoire - est le bien le plus précieux que je pourrais hériter de ma mère car "c'est Elle"... sa jeunesse, sa vie, sa passion et son labeur au quotidien qui l'a amenée, même beaucoup plus tard, à continuer à coudre pour les autres uniquement pour le plaisir : des robes, des manteaux, des jupes, des tailleurs, des robes de mariées sans oublier les tricots qu'elle a confectionnés très pour les bébés, ses arrière-petits-enfants, ses petits-enfants qui lui passaient commande... tout ceci ne doit pas être oublié !
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M
Beaucoup d'émotion et de plaisir en lisant ce beau sujet en hommage à toutes ces petites mains et aux trésors qu'elles ont su créer. Je n'avais alors pas conscience d'être le témoin du déclin d'une ancienne publication et de ses "ouvrages de dames", ils n'en sont que plus précieux à mes yeux. En attendant le cahier d'apprentissage de ta maman, merci Jackie.
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J
Merci pour ce joli témoignage, Martine ! j'en ai effectivement entendu parlé dans mon enfance par ma mère et ma grand-mère (qui avait été modiste à une époque très lointaine avant les années 30...) - cela m'a d'ailleurs donné envie d'en savoir un peu plus sur ce temple de la mode ! j'ai trouvé quelques informations que je vais partager dans un sujet spécialement dédié à toutes les couturières et ouvrières de la mode et à toi aussi bien sûr ! j'espère que ceci te ravira autant que cela m'a tenté aux premières images retrouvées !
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M
Les dons de ta maman font revivre de lointains souvenirs de mon tout premier emploi, dans un magazine féminin qui n'existe plus, "L'Echo de la Mode", rue Gazan en face du parc Montsouris. Il y avait un grand atelier où une cinquantaine de couturières découpaient des patrons, pliés ensuite dans des pochettes présentant le vêtement, joliment dessiné et peint à la main par mes collègues. Ta maman a peut-être utilisé ces patrons, dont la transformation en vêtements me faisait rêver, moi qui suis restée une nullité incurable en couture. Mais si j'avais eu une maman comme la tienne...
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C
Je me souviens de ma grand-mère, elle avait du rhumatisme déformant et me disait qu'il était impératif qu'elle occupe ses doigts pour limiter la douleur. Elle crochetait à merveille ;)
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