Lundi 22 mars - "Proteger les enfants"
Nous fêtons les Léa, Leïla, Lia, Liane
Sainte Léa, une patricienne romaine, disciple de Saint Jérôme. Une fois devenue veuve, elle distribua ses biens aux pauvres et entra dans un monastère romain dont elle devint la supérieure jusqu'à sa mort en 384.
Le prénom Léa est un prénom hébreu que porte la première femme de Jacob dans la Genèse, Ancien Testament.
🌍 C'est la Journée mondiale de l'eau
🖋 Le dicton du jour : "En mars les vaches au pré, si ce n'est pour manger, c'est pour s'y gratter"
22 mars 1841 - Première loi française protégeant le travail des enfants
Le 22 mars 1841, une loi limite en France, pour la première fois, le travail des enfants employés dans les manufactures, usines ou ateliers, interdisant le travail avant 8 ans, et limite les heures avant 16 ans. Elle sera mal appliquée, et ne supprimera pas la torture des enfants de 6 à 8 ans forcés d’aller jusqu’aux ateliers pour y travailler.
La loi est promulguée par Louis-Philippe, roi des Français, le maréchal Jean-de-Dieu Soult (73 ans) étant président du Conseil. Elle s'inspire d'une loi similaire promulguée en Angleterre neuf ans plus tôt, en 1833.
L'article 2 énonce :
Les enfants devront, pour être admis, avoir au moins huit ans.
De huit à douze ans, ils ne pourront être employés au travail effectif plus de huit heures sur vingt-quatre, divisées par un repos.
De douze à seize ans, ils ne pourront être employés au travail effectif plus de douze heures sur vingt-quatre, divisées par des repos.
Ce travail ne pourra avoir lieu que de cinq heures du matin à neuf heures du soir.
Retour sur une histoire bien cruelle et intolérable
L’anecdote se déroule dans les années 1800 : aux manufacturiers anglais venus lui réclamer une baisse d’impôt, le Premier ministre, William Pitt, répond : « Prenez les enfants ! »
Lorsqu’en 1877, l’historien Jules Michelet rapporte ce « mot terrible », plus d’un demi-siècle s’est écoulé. Face au caractère intolérable des conditions de travail qui sont imposées aux enfants, de premières réglementations voient finalement le jour durant ces premières décennies du XIXe siècle. Le travail est interdit aux enfants de moins de 8 ans. Les réglementations sont ensuite renforcées à plusieurs reprises. Mais seuls les progrès techniques et la nécessité de former les ouvriers, couplés aux nouvelles lois scolaires, viendront véritablement à bout du travail des enfants.
Un nouvel esclavage
En France comme en Angleterre, vers 1840-1850, les enfants de moins de 14 ans représentent 15 à 20 % de la main-d’œuvre des manufactures et des usines. Le travail des enfants n’est pourtant pas en soi une nouveauté, il est usuel dans l’agriculture comme dans l’artisanat. Mais avec les nouvelles conditions de travail engendrées par l’industrie textile mécanisée, il s’apparente à un nouvel esclavage. Médecins, hygiénistes, philanthropes, réformateurs sociaux et industriels progressistes soulignent les effets mortifères pour les enfants de journées de 14 heures passées sous les métiers textiles : déformations physiques, rachitisme, tuberculose... La mortalité est également élevée : à Mulhouse, entre 1812 et 1827, parallèlement à la croissance de l’industrie, la durée de vie moyenne diminue de quatre ans, et la moitié des enfants n’atteignent pas l’âge de 10 ans.
Première loi de limitation du travail des enfants
Pour la première fois en France, le 22 mars 1841, une loi est votée sur le travail des enfants employés dans les manufactures, usines ou ateliers : l’âge minimum pour travailler est fixé à 8 ans dans les entreprises de plus de 20 salariés, et la journée de travail limitée à 8 heures pour les 8-12 ans, et 12 heures pour les 12-16 ans ; ce travail ne peut avoir lieu « que » de 5 heures du matin à 9 heures du soir.
Faire appliquer la loi
Rareté des inspections, amendes insuffisantes, puissance des intérêts économiques en jeu, accord tacite des parents les plus pauvres... Ces premières lois de limitation du travail des enfants ne sont pas suivies des effets espérés par le législateur.
Pourtant le mouvement d’opinion est lancé. Aux premiers travaux d’enquête sur le terrain succèdent les enquêtes de journalistes. Et de nombreux romans mettent en scène l’intolérable condition des enfants – ainsi David Copperfield (1850) au Royaume-Uni ou Cosette en France dans Les Misérables (1862).
Scolarité obligatoire et formation
Après la guerre de 1870, la loi du 18 mai 1874, dite « loi Joubert », élève l’âge minimum à l’embauche à 12 ans, avec une journée de travail limitée à 6 heures, et à 12 heures de 13 à 16 ans. Le travail de nuit est interdit jusqu’à cet âge. Quinze postes d’inspecteurs du travail rémunérés par l’État sont également créés pour faire respecter la loi.
La réglementation du travail des enfants est ainsi renforcée à plusieurs reprises au cours du XIXe siècle. Mais si l’emploi industriel des jeunes enfants tombe à moins de 5 % à la veille de la Première Guerre mondiale, c'est que l’évolution des techniques de l’industrie exige un savoir-faire supposant une formation, ce qui conduit à une moindre utilité des enfants. La demande porte désormais sur les jeunes ouvriers qualifiés.
À cette première cause s’ajoute la généralisation de l’enseignement primaire qui, grâce aux lois Ferry (1881 et 1882) sur la gratuité et l’obligation scolaire, diminue le nombre d’enfants au travail. La logique des nouvelles demandes de l’économie conduit tous les pays européens à prolonger peu à peu la scolarité obligatoire.
Tableau recensant, par nature d'industrie, les enfants de 8 à 16 ans employés dans les établissements de Mulhouse soumis à la loi de 1841 (Archives municipales de Mulhouse)